Océan & climat

L’Océan : un thermostat qui s’emballe

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Plongée d'évaluation de la mortalité des peuplements de gorgones pourpres (Paramuricea clavata)

Plongée d'évaluation de la mortalité des peuplements de gorgones pourpres (Paramuricea clavata). Changement climatique : Victimes de la température record de l’eau en Méditerranée en été 2022, les gorgones rouges ont subi une mortalité importante.

Ça chauffe pour l’océan ! Chaque année on assiste à une envolée des records de chaleur comme le confirmait encore les derniers chiffres publiés par Copernicus1 , l’observatoire européen de la Terre en septembre 2023. Chaque jour, du 31 juillet au 31 août 2023, les températures moyennes mondiales à la surface de la mer ont dépassé le précédent record de mars 20162 . Le mois d'août 2023 dans son ensemble a connu les températures moyennes mensuelles à la surface de la mer les plus élevées jamais enregistrées, tous mois confondus, avec 20,98°C, et a été bien au-dessus de la moyenne pour un mois d'août, avec une anomalie de 0,55°C marin. Via Mercator International3 dont il est membre, l’Ifremer contribue d’ailleurs à enrichir les données de Copernicus (Copernicus Marine Services).
  • 1https://marine.copernicus.eu/
  • 2https://climate.copernicus.eu/sites/default/files/2023-08/C3S_MonthlyMaps_July2023-FR.docx
  • 3https://www.mercator-ocean.eu/en/about-mercator-ocean-international/

Ce réchauffement a des répercussions en cascade sur l’ensemble de l’écosystème et sur la capacité de  l’Océan à réguler le climat. L’Océan pourrait en effet être défini comme le « thermostat » de la Terre. Il capte la chaleur du soleil, la stocke et la redistribue grâce à la circulation océanique de l’équateur vers les pôles, ce faisant il contribue à tempérer les climats extrêmes. Outre ce rôle de thermostat, l’Océan constitue aussi un puits de carbone particulièrement performant, plus efficace même qu’une forêt. Il a la propriété de diluer le CO2 rejeté dans l’atmosphère pour le piéger en profondeur et ainsi limiter l’effet de serre. Ce carbone est aussi nécessaire au phytoplancton, premier maillon de la chaîne alimentaire océanique, pour produire du dioxygène grâce à la lumière du soleil.

Malheureusement cette machinerie climatique complexe s’enraye aujourd’hui, car l’océan, saturé de CO2, perd de son pouvoir d’absorption, la dissolution n’opérant pas aussi bien dans les eaux chaudes que dans des eaux froides. Et ce n’est pas la seule conséquence : cette « indigestion » de CO2 modifie aussi la chimie de l’eau dont le pH s’acidifie. L’acidité de l’Océan a augmenté de 30 % en 250 ans. Certains éléments comme le carbonate indispensable à la fabrication des coquilles et squelettes calcaires de nombreux organismes marins se font plus rares et pourraient devenir à l’avenir insuffisants. Un océan plus chaud, c’est aussi un océan qui se dilate et occupe un plus grand volume d’eau, un phénomène encore majoré par la fonte des glaces. Une concomitance de causes qui se traduit par une élévation générale du niveau de la mer. Toutes ces modifications à l’œuvre dans l’océan généreront aussi leur cortège de turbulences sous forme d’événements climatiques extrêmes de plus en plus intenses et fréquents : tempêtes, cyclones, crues et inondations, canicules marines figureront en bonne place sur la liste.

L’impact du réchauffement climatique s’invite nécessairement dans le quotidien des chercheurs en sciences océaniques de l’Ifremer comme un sujet transversal à toutes les disciplines.

Notes