Pourra-t-on demain se parler en plongée ou encore produire de l’hydrogène grâce à des microbes des abysses ?

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Le concours Octo’pousse, lancé par l’Ifremer en début d’année et dont l’objectif est d’accélérer la création de start-ups dans le domaine maritime, a désormais ses lauréats. Sur les quarante dossiers reçus lors de cette première édition, ce n’est finalement pas un mais deux projets en faveur de l’économie bleue qui ont retenu l’attention du jury et du Ministère de la Mer. Le premier développe une solution pour démocratiser l’accès aux océans, le deuxième pour produire l’énergie verte de demain.   

Agiles, créatives et capables de prendre des risques, les start-ups sont incontournables pour développer des innovations de rupture. C’est dans ce sens qu’a été lancé le concours d’innovation Octo’pousse par l’Ifremer : identifier et accompagner  des projets qui ambitionnent de relever les défis auxquels notre société et l’océan sont confrontés. Ce dispositif permet un accompagnement humain (collaboration avec les équipes de recherche), matériel (accès aux moyens d’essai et aux laboratoires) et financier (contrat de travail de 18 mois et budget de 60 000 euros). Encourager la création et l’accompagnement de start-ups, tout comme développer les collaborations entre les entreprises, permet à l’Ifremer d’orienter certaines de ses questions de recherche au plus proche des attentes de la société. 

Près de 40 candidatures ont été reçues et analysées au printemps, couvrant des champs thématiques variés: aquaculture, énergies nouvelles, collecte et transformation des déchets... Du fait de la qualité des projets finalistes, de leur diversité thématique et de la différence de maturité, deux projets ont finalement été sélectionnés en tant que lauréats Octo’pousse. Ils commencent leur aventure au sein de l’Ifremer cet automne.

52 Hertz : un talkie-walkie sous-marin, pour que les plongeurs puissent enfin se parler

Jusqu’à présent, les plongeurs dialoguent entre eux dans un langage utilisant les mains. Ce dialogue est limité, avec une vingtaine de signes principalement en cas d’alerte. Et la communication est impossible en cas de visibilité réduite dans l’eau. 

Ce constat a surpris les deux frères, Jonas et Gabriel Guerche, créateurs de la start-up 52 Hertz, dont le nom est inspiré par la fréquence du chant d’une baleine.

« Nous nous sommes initiés à la plongée pendant nos études. Et nous étions sidérés : comment est-ce possible qu’en ce 3e millénaire imprégné de télécommunication, les plongeurs n’aient aucun moyen de dialoguer entre eux ? », racontent les deux frères, aujourd’hui âgés de 28 et 24 ans.

Pour l’Ifremer, le projet s’inscrit dans la continuité des études concernant la sécurisation des activités en mer, sur les volets de communication entre plongeurs et de communication entre le fond et la surface. Pour le grand public, le Talky-Divy pourrait révolutionner l’expérience de la plongée et l’approche du monde sous-marin. 

52 Hertz : un talkie-walkie sous-marin, pour que les plongeurs puissent enfin se parler.

Grhyn : produire de l’hydrogène grâce à des microbes des grands fonds

L’utilisation de l’hydrogène dans nos industries a un immense potentiel pour réduire nos émissions de gaz à effets de serre, et donc diminuer l’impact du dérèglement climatique. Mais l’« économie hydrogène » n’a de sens que si sa production est durable et n’engendre pas elle-même d’émissions de CO2.

Suite à son doctorat à Brest au sein du Laboratoire de microbiologie des environnements extrêmes, Jordan Hartunians (29 ans) a perçu le potentiel de certaines archées, des micro-organismes que l’on peut trouver dans les grands fonds, pour produire de l’hydrogène avec des rejets de COréduits.

« Ces archées se nourrissent de molécules organiques, qu’on peut trouver par exemple dans nos déchets, pour produire naturellement de l’hydrogène, explique-t-il. Dans les 18 mois à venir, je compte optimiser cette culture, en réduisant notamment les rejets de CO2, et présenter un premier prototype en vue d’une future industrialisation. » A terme, l’idée est de créer des « brasseries » avec des cuves de culture de micro-organismes qui pourraient atteindre plusieurs milliers de litres.

Son projet, baptisé Grhyn, s’appuie pour l’instant sur des approches théoriques. « Je vais pouvoir collaborer avec deux laboratoires de l’Ifremer spécialisés sur la biologie et la chimie des grands fonds marins, avec des bioréacteurs adaptés à mes besoins. C’est une opportunité exceptionnelle pour concrétiser mon projet, avec en plus un appui pour la création de mon entreprise », se réjouit Jordan Hartunians. 

Le projet Grhyn s’intègre aux recherches des équipes Ifremer sur les archées et permettra également de mieux comprendre leurs mécanismes d’adaptation aux environnements extrêmes. Il est à la croisée de deux objectifs fixés dans le cadre du plan d’investissement France 2030 : l’hydrogène vert et l’exploration des fonds marins.

Prochaine édition du concours Octo’pousse à suivre en janvier

Fort de la diversité et de la qualité des projets reçus en 2021, l’Ifremer lancera la deuxième édition du concours début 2022, tenez-vous prêts ! Octo’pousse va ainsi continuer à déployer ses tentacules pour attirer les bonnes idées au service de l’économie bleue. 

Grhyn : produire de l’hydrogène grâce à des microbes des grands fonds.

Les projets lauréats Octo’pousse sont financés par l’Ifremer et par le Ministère de la Mer.