Comprendre les écosystèmes marins et littoraux pour mieux les restaurer

Aujourd’hui, près de la moitié de l’humanité vit près du littoral. Les milieux marins et littoraux sont ainsi souvent affectés par des pollutions et dégradations. Pour aider ces milieux à retrouver une bonne santé, leurs gestionnaires instaurent des mesures de conservation et de restauration. L’Ifremer mène des activités scientifiques en écologie de la restauration : nous observons les écosystèmes, nous accompagnons les gestionnaires, nous inventons des solutions fondées sur la nature.

Comment sait-on qu’un écosystème est dégradé ?

L’Ifremer suit dans le temps l’état de santé et la biodiversité des écosystèmes marins, avec une attention particulière pour les milieux dégradés. Pour cela, nos scientifiques analysent la qualité de l’eau, sa teneur en contaminants, en oxygène, l’évolution de son pH, mais également ses couvertures algales… Ils évaluent l’état des espèces locales, la présence d’espèces introduites, la diversité des espèces présentes, etc. Un autre indicateur important est le bon fonctionnement de l’écosystème. Nos scientifiques évaluent par exemple si la croissance des espèces, la filtration de l’eau, la captation de carbone se déroulent correctement.

Depuis les années 80, l’Ifremer suit ces dégradations de l’environnement grâce à des observations régulières de l’état de santé du littoral.

Valérie Derolez
Ifremer | Écologue

Peut-on « réparer » les écosystèmes ?

Une attente de la société et une obligation réglementaire européenne

Les gestionnaires locaux des espaces marins (collectivités, associations, parcs naturels, etc.) travaillent à maintenir ou atteindre le bon état des écosystèmes. Cela passe parfois par la restauration des populations animales, végétales, ou du fonctionnement écologique des écosystèmes. La restauration des milieux terrestres est mise en œuvre depuis des dizaines d’années, mais la restauration des milieux marins est une thématique émergente en France.

Restauration, réhabilitation, compensation ?

Une restauration écologique complète, c’est-à-dire un retour à l’état initial avant dégradation, n’est pas toujours possible. Les gestionnaires peuvent toutefois mettre en place des mesures d’amélioration, pour faire revenir une partie des espèces et des fonctions de l’écosystème, sans viser l’exhaustivité. On parle alors de réhabilitation. Dans certains milieux fortement urbanisés, l’utilisation du génie écologique peut aussi favoriser le retour de toute une biodiversité : on parle de compensation écologique.

Un accompagnement et une expertise en écologie de la restauration

L’Ifremer apporte son expertise dans ces différents domaines de l’écologie de la restauration. L’institut accompagne les acteurs locaux dans la mise en œuvre de nouvelles solutions, notamment celles fondées sur la nature. Nos scientifiques fournissent les résultats de la recherche scientifique et de l’observation des milieux. Ils apportent leur connaissance du fonctionnement de l’écosystème pour identifier les priorités d’action. Ils aident les parties prenantes à choisir les solutions pertinentes en faveur de la  biodiversité et des usages durables. Ils inventent les solutions écologiques de demain permettant le retour d’espèces natives en déclin, tout en évitant l’installation d’espèces invasives. Enfin, pour anticiper les effets du changement climatique, nos chercheurs modélisent les écosystèmes, évaluent leur évolution potentielle et imaginent des solutions de résilience. 

On ne peut pas restaurer sans connaître la biologie de l’espèce.

Stéphane Pouvreau
Ifremer | Écologue

Comment restaurer la biodiversité ?

La diminution des pressions à l’origine des dégradations (ou « restauration passive »)

La première étape est toujours de réduire les causes de dégradation des écosystèmes (pollution, destruction…). Nos équipes cherchent à comprendre les mécanismes écologiques pour évaluer l’effet de ces mesures et évaluer le délai de rétablissement de la biodiversité.

Le temps de la restauration est parfois long. La lagune de Thau, en région Occitanie, est suivie par l’Ifremer depuis plus de 50 ans. Grâce à des travaux d’assainissement, les acteurs locaux ont réduit fortement les émissions de phosphates et de nitrates en excès, qui causent des crises d’asphyxie dans la lagune en été. Pourtant, il a fallu 20 ans pour retrouver une qualité de l’eau conforme à la réglementation. Et 10 ans de plus pour le retour des herbes marines.

La restauration active d’habitats prioritaires à enjeux écologiques majeurs (ou les solutions d’« ingénierie écologique »)

Certains écosystèmes sont structurés autour d’espèces ingénieurs qui construisent des habitats remarquables : jardins de coraux, prairie d’herbiers, champs d’algues, récifs de coquillages bivalves... Lorsque ces espèces structurantes sont en déclin, tout l’écosystème est alors menacé. Pour favoriser le maintien ou le retour de ces espèces clés, l’Ifremer contribue, avec d’autres instituts, à des recherches et du développement en ingénierie écologique. Nos scientifiques cherchent à comprendre les besoins de ces (sidenote: Espèce ingénieur Une espèce ingénieur a la capacité de créer son propre habitat. Elle donne ainsi un support à de nombreuses autres espèces et apporte de nombreux services écologiques utiles à l’environnement et aux humains. ) et usent d’astuces écologiques pour favoriser leur réinstallation dans les milieux dégradés.  

L’huître plate Ostrea edulis, native des côtes européennes, est en fort déclin et les récifs huîtriers qu’elle construit ont quasiment disparu de nos côtes. Pour y remédier, l’Ifremer teste différentes solutions écologiques permettant de reconstruire ces formations récifales. En créant des supports calcaires ou métalliques, il est en effet possible d'attirer les jeunes larves d'huîtres et leur permettre de reconstruire leur récif, comme si elles étaient sur la coquille de leurs parents au sein du récif perdu. Nous préparons ainsi les connaissances nécessaires et les appuis scientifiques qui serviront les projets de restauration de demain.

Installer des récifs artificiels (la compensation écologique)

Les petits fonds côtiers sont des zones essentielles à la reproduction des poissons. Or, ces zones sont souvent dégradées par les aménagements (ports, digues, etc.). L’installation de récifs artificiels est utilisée de longue date. Ils deviennent des abris, des nurseries de poissons et favorisent ainsi la biodiversité. Une autre possibilité est de valoriser des structures portuaires existantes. Elles sont mobilisées en tant que récifs, sans encourager la construction de nouvelles structures en mer !

Dans le port de La Seyne-sur-Mer, près de Toulon, l’Ifremer teste des récifs artificiels éco-conçus. Il s’agit d’évaluer leur intérêt par rapport aux structures « classiques » : quels poissons viennent les coloniser ? Quels sont les mécanismes d’arrivée des poissons ? Quel fonctionnement écologique est rétabli ?

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